Les grossesses précoces, un fléau persistant en République dominicaine

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La République dominicaine demeure l’un des pays d’Amérique latine les plus touchés par les grossesses précoces. Malgré les campagnes de sensibilisation, les stratégies nationales et l’appui d’organismes internationaux, les chiffres restent préoccupants et témoignent d’un phénomène enraciné dans des causes structurelles profondes.

Selon les données du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), environ 20 % des naissances dans le pays proviennent de mères âgées de moins de 20 ans. Dans certaines zones rurales, cette proportion dépasse même les 30 %. La taux de fécondité chez les adolescentes (15 à 19 ans) est de 94 naissances pour 1 000, l’un des plus élevés de la région.

Les conséquences sont dramatiques. Le 52 % des jeunes filles enceintes abandonnent l’école, selon l’Institut dominicain d’évaluation et de recherche sur la qualité éducative (IDEICE), et très peu y retournent. La grossesse précoce limite non seulement l’accès à l’éducation, mais perpétue aussi un cycle de pauvreté et de dépendance économique.

Le phénomène varie fortement selon le milieu social. Dans les zones les plus défavorisées, jusqu’à 145 adolescentes sur 1 000 deviennent mères, contre 28 sur 1 000 dans les milieux les plus aisés. Cette disparité met en lumière le rôle central de l’inégalité dans l’exposition au risque.

Les causes sont multiples : absence d’une éducation sexuelle intégrale dans les écoles, accès limité aux services de santé reproductive, tolérance culturelle envers les unions précoces, et application inégale des lois de protection de l’enfance.

Malgré l’adoption de plusieurs plans nationaux de prévention depuis 2001, dont le Plan stratégique 2011–2016 et le Plan national 2019–2023 (PREA-RD), les résultats tardent. En 2024, 17 846 adolescentes ont été enceintes, contre 23 070 en 2023. Si cette baisse — la cinquième consécutive — est encourageante, elle demeure insuffisante au regard des standards internationaux de santé publique.

Le coût de ce fléau est lourd. L’UNFPA estime que les grossesses précoces coûtent à l’État dominicain 131 millions de dollars US par an, en pertes de productivité, soins médicaux et soutien social.

Face à cette urgence sociale, les experts appellent à une mobilisation politique réelle, centrée sur l’éducation, l’accès à la contraception, l’autonomie des adolescentes et une justice active pour sanctionner les abus. Car derrière chaque statistique, se cache une vie bouleversée, un avenir compromis.



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