Politique migratoire américaine et contentieux juridique
Des bénéficiaires haïtiens du TPS intentent une action collective contre l’administration Trump.
Remarque : Le gouvernement de doublure de Port-au-Prince n’a pris aucune mesure pour protéger les citoyens haïtiens bénéficiant du TPS contre l’expulsion. Il convient de noter que le ministère haïtien des Haïtiens vivant à l’étranger s’est révélé inefficace et inutile pour la diaspora, en depit des propagandes de la ministre et de la Primature
Washington D.C. – Cinq ressortissants haïtiens bénéficiant du Temporary Protected Status (TPS) ont saisi la justice fédérale du district de Columbia pour contester la décision du Département de la Sécurité intérieure (DHS), sous l’autorité de la secrétaire Kristi Noem, de mettre fin à la protection humanitaire accordée aux Haïtiens. La plainte, déposée mercredi en recours collectif, dénonce une décision « arbitraire, discriminatoire, contraire à la procédure légale et motivée par une hostilité raciale envers les Haïtiens ».
Le TPS, instauré en 2010 après le séisme dévastateur ayant fait plus de 300 000 morts en Haïti, avait pour objectif de protéger temporairement les ressortissants haïtiens présents aux États-Unis, en leur accordant un droit de séjour avec autorisation de travail. Pourtant, malgré la dégradation persistante de la situation sécuritaire en Haïti, le DHS a tenté à plusieurs reprises de suspendre ce statut, exposant les bénéficiaires à des risques élevés en cas de retour forcé.
Les avocats des plaignants — issus des cabinets Kurzban Kurzban Tetzeli & Pratt, Just Futures Law, Giskan Solotaroff & Anderson, et Bryan Cave Leighton Paisner — affirment que la décision de Noem constitue non seulement un abus de pouvoir, mais viole également les droits constitutionnels des plaignants. « L’administration ne peut pas réécrire les faits pour justifier une décision politique fondée sur la discrimination », a déclaré Sejal Zota, directrice juridique de Just Futures Law.
Dans le contenu de l’assignation, les avocats citent les propos passés de Donald Trump lors de sa campagne présidentielle de 2024, où il aurait insinué à Springfield, Ohio, que des Haïtiens mangeaient les animaux domestiques de leurs voisins américains — un exemple parmi d’autres de discours jugés ouvertement racistes.
La plainte rappelle que plusieurs décisions antérieures de la justice fédérale ont déjà invalidé les tentatives similaires de l’administration Trump, notamment celle qui visait à réduire rétroactivement la durée du TPS. En juillet dernier, un juge fédéral de New York a statué que Noem n’avait pas l’autorité légale pour écourter la protection des Haïtiens de 18 à 12 mois. La date de fin du statut reste donc fixée au 3 février 2026, bien que le DHS ait exprimé son désaccord avec cette décision.
Des vies menacées, des parcours exemplaires
Parmi les cinq plaignants figure Vilbrun Dorsainvil, ancien médecin haïtien, aujourd’hui infirmier dans l’Ohio. Arrivé en 2021, il a acquis une maison et exerce légalement sous statut TPS. Autre profil emblématique : Fritz Miot, doctorant en neurosciences en Californie, porteur d’un diabète juvénile nécessitant un traitement médical quotidien inaccessible en Haïti. Une déportation compromettrait non seulement sa santé, mais aussi sa contribution à la recherche scientifique.
Le dossier inclut également le témoignage poignant de Marlene Gail Noble, atteinte de tuberculose spinale et abandonnée dès l’enfance en Haïti. Accueillie aux États-Unis par une ONG chrétienne, elle a vécu une enfance marquée par les abus au sein de familles d’accueil et d’adoption. Ce n’est qu’en 2023 qu’elle a pu déposer une demande de TPS avec l’aide de son avocat.
La question du droit et du devoir
Le recours souligne que les conditions actuelles en Haïti — marquées par la violence armée, les déplacements forcés, la famine et un effondrement institutionnel — rendent tout retour humainement et juridiquement inacceptable. Le Département d’État lui-même déconseille tout déplacement en Haïti. Le pays est placé sous état d’urgence depuis mars 2024. L’ONU estime à plus de 5 000 le nombre de victimes de gangs en 2023, et à 4 000 depuis janvier 2025. Plus de 1,3 million de personnes sont déplacées, sans accès à un logement digne.
« La fin du TPS renverrait des Haïtiens légalement installés vers un État défaillant contrôlé par des bandes armées, où leur vie serait en danger », a rappelé Brian Concannon, directeur de l’Institute for Justice and Democracy in Haiti, partenaire du dossier.
Les avocats insistent également sur la probité des bénéficiaires du TPS : absence de casiers judiciaires, exclusion des aides publiques fédérales, forte implication communautaire. La loi interdit explicitement aux individus ayant plus d’une condamnation mineure d’accéder au statut. En somme, les Haïtiens visés incarnent le profil même que le Congrès avait voulu protéger en créant le TPS en 1990.
source: Miami Herald