Le travail forcé persiste à Central Romana !

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L’administration Trump lève l’interdiction de la compagnie sucrière Central Romana pour cause de travail forcé, mais rien n’a changé pour les travailleurs des champs de cannes

La sanction est levée, pas l’exploitation : le travail forcé persiste à Central Romana

 

Le 23 novembre 2022, le Service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis (CBP) a émis une ordonnance de cessation de travail (WRO) contre Central Romana Corporation, interdisant l’entrée de sucre et de produits dérivés du sucre en provenance de République dominicaine, après avoir identifié des pratiques constitutives de travail forcé. Parmi les indicateurs documentés figuraient : l’abus de vulnérabilité, l’isolement, la retenue sur salaire, des conditions de vie et de travail inadéquates et des horaires de travail excessifs.

Le 17 mars 2025, le CBP a levé l’ordonnance, suggérant que l’entreprise avait remédié aux irrégularités signalées. Cependant, les organisations signataires, qui documentent directement la situation dans les bateyes et les communautés de travailleurs depuis des années, affirment que les indicateurs de travail forcé persistent et se sont aggravés dans un contexte d’hostilité croissante et de politiques d’immigration restrictives en République dominicaine.

Depuis fin 2023, le gouvernement dominicain durcit ses politiques d’immigration, avec des opérations de détention plus fréquentes, des expulsions massives et un climat d’hostilité croissant envers la population haïtienne et les personnes d’origine haïtienne. Ces mesures ont accentué la vulnérabilité des travailleurs migrants, qui constituent la majorité de la main-d’œuvre de Central Romana. La crainte d’être expulsés, même sur le chemin du travail ou à leur domicile, a accru leur dépendance à l’égard de l’entreprise, réduit leur capacité à déposer plainte et a encore détérioré leurs conditions de vie.

Par ailleurs, nous avons reçu des informations indiquant que Central Romana a renforcé les mesures de sécurité dans ses installations, avec la présence constante de personnel de sécurité et des restrictions accrues aux déplacements à l’intérieur et à l’extérieur des bateyes. Cela a accentué l’isolement physique et social des travailleurs, aggravant leur déconnexion des réseaux de soutien extérieurs et alimentant la crainte de représailles s’ils tentent de signaler des irrégularités ou de quitter l’espace assigné sans autorisation. Cette situation renforce plusieurs indicateurs de travail forcé décrits par les organisations internationales : isolement, abus de vulnérabilité et restriction de mouvement.

Les conditions précédemment relevées par le CBP n’ont pas été structurellement corrigées. La retenue partielle des salaires, le manque de transparence des paiements et l’absence de paiement des heures supplémentaires persistent. Le logement dans les bateyes reste précaire et beaucoup sont éloignés des services de base. Les journées de travail restent longues et ne bénéficient pas des garanties minimales requises par la loi.

Compte tenu de cette réalité, il est préoccupant que la levée de l’ordonnance de travail forcé ait eu lieu sans évaluation publique, technique et indépendante attestant d’améliorations substantielles des conditions de travail. Un article récent du New York Times suggère que la décision du CBP pourrait avoir été influencée par des facteurs politiques, notamment les liens entre les propriétaires de l’entreprise et des acteurs influents du gouvernement américain, plutôt que par une vérification rigoureuse du respect des normes internationales sur le travail forcé.

Nous réaffirmons qu’un travail décent ne peut être conditionné au statut migratoire de quiconque. Les conditions avérées de précarité, d’isolement et de peur sont incompatibles avec une vie digne et doivent être traitées de toute urgence par les autorités compétentes. À cet égard, nous exhortons Central Romana à se conformer aux normes nationales et internationales en matière de droits du travail et de droits humains.

Par conséquent, nous appelons les médias, les journalistes, les organisations de la société civile et les acteurs internationaux à suivre de près cette situation, à exiger la transparence des décisions réglementaires et à faire entendre la voix des personnes directement concernées.

 

Organisations signataires :

Centro de Investigación y promoción Social (Cipros)

Centro Montalvo

Coordinadora de Organizaciones Barriales Don Bosco (Codonbosco)

Espacio de Capacitación, Pensamiento Crítico y Empoderamiento Juvenil (ESCAPE)

Radio Seybo

Unión de Trabajadores Cañeros (UTC)

Mouvement des travailleurs socialistes de la République dominicaine
23 juin 2025

 

 

 



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